Après 3 mois passés en estive sur les hauts de la Gela, il est temps de redescendre dans le bas de l’Aure. Cette année, ils sont venus à 6 nous chercher, nous qui n’étions que 11 ! Mais 11 blondes ensemble, ça fait du pétard. D’ailleurs, ils ne nous ont pas trouvées tout de suite. On était sur les hauts plateaux, un peu cachées. Cela leur aura fait les pieds et les mollets d’arpenter les dessous de Chermentas. Ils disent qu’ils ont fait plus de 30 km et près de 45 000 pas pour venir nous chercher, mais ont-ils seulement envisagé combien de sabots nous avons du aligner pour les accompagner ?
Comme ils ne le demandaient pas, on leur a quand même expliqué que le séjour en altitude s’était bien passé. La vachère était aux petits soins avec nous et nous n’avons manqué de rien. Surtout pas d’eau qui est tombée en Abondance, comme dit notre voisine des Alpes… Résultat : nous disposions d’une herbe grasse à souhait que nous aurions pu encore brouter jusqu’à l’orée de l’automne … Mais bon, le patron a décidé qu’on redescendait, alors, nous, bonnes filles, on s’exécute …
Sinon, quelques pertes sont à déplorer parmi les collègues dont quelques glissades sur du gispet détrempé qui ont mal fini. Les vautours, avec l’appétence qu’on leur connait, ont terminé le travail …
Qu’on vous dise : à force de flâner, en toute liberté, dans ces espaces de toute beauté, nous sommes devenues contemplatives, retenant avec difficulté l’émotion qui nous submergeait à la vue d’un joli papillon ou d’une tendre fleur. Aussi, lors du retour, avons-nous vécu assez durement l’encadrement de ces vachers d’opérette qui flanquaient sans discernement des coups de bâtons sur nos belles croupes de blondes pour nous faire avancer*.
Nous nous consolions de notre sort en pensant à la triste condition de nos camarades du nord de la France, « stabulées » dans les étables à mille vaches, ces « musines », comme ils disent …
Après quelques 20 km passés sur l’enrobé, et une traversée très calme de Saint-Lary où nous n’avons même pas goûté aux belles jardinières, nous avons enfin atteint la terre promise, en l’occurrence un beau pré bien frais pour refroidir nos sabots surchauffés par un tel parcours.
Bon, on vous laisse sur ces « pansées », vu qu’on a encore pas mal de chose à ruminer jusqu’à la prochaine sortie.
Avec les filles, on vous embrasse et on vous dit à la prochaine transhumance !
* Cette méthode assez rude est basée sur l’effet de croupe
Cliquez sur l’image pour voir notre fantastique odyssée entre pâtures et bitume …
Les « musines »… une vraie vacherie…
Merci pour ce beau texte Phil.